Séminaire numérique de recherche 2018 & 2019 :

Tout le programme des séminaires numériques 2018 & 2019

Les études culturelles : Enjeux, pistes et apports pour les recherches sur les cinémas d’Afrique et du Moyen-Orient

Les cinémas d’Afrique et du Moyen Orient constituent un ensemble d’histoires et de contextes politiques, économiques, sociaux et culturels de « cinémas des petites nations » spécifiques (Hjort and Petrie 2008).

Ce sont comme partout les films et leurs auteurs qui ont suscité le plus d’intérêt tandis que les questions liées à l’économie des films, leur circulation, les cultures de cinéma, les publics et la réception sont restées relativement marginales. L’industrie nigériane et ses émules, avec une production à bas coût de films de divertissement qui ont irrigué les marchés locaux, nationaux, régionaux, diasporiques, ont contribué depuis deux décennies à renouveler les questionnements comme dans une moindre mesure les nouvelles industries du cinéma dans les pays du Golfe. Il n’en demeure pas moins que les lieux de production, la circulation des films, les nouveaux formats privilégiés, nous imposent de sortir des cadres de la construction des savoirs qui faisaient des cinémas nationaux des marqueurs des identités issues des nouvelles indépendances, d’autant que la pléthore s’est substituée à la rareté et que la place des productions locales ou régionales dans la consommation varie beaucoup. Une des ambitions du réseau HESCALE est de retourner le regard pour explorer les filières et les acteurs, la circulation et la réception des films. Dans le cadre du séminaire de recherche, nous aimerions cette année poser la question des enjeux, des pistes et des apports potentiels des approches critiques et empiriques telles que les « cultural studies » et les « reception studies » qui ont permis d’interroger les hiérarchies, la capacité d’agir des acteurs, les modalités de la réception, etc. Nous aimerions dresser un premier bilan de la façon dont de telles approches ont pu nourrir les recherches, contribuer à la reformulation des hypothèses, initier des réflexions sur de nouveaux objets ou légitimer de nouveaux champs de recherche.

Organisateurs et modérateurs : Patricia Caillé (Université de Strasbourg) et Vincent Bouchard (Indiana University – Bloomington). Contact : patricia.caille@unistra.fr

Ce séminaire est rendu possible par le soutien de l’IUT Robert Schuman et l’Université de Strasbourg.

Les vidéos seront accessibles sur le site HESCALE deux jours avant chaque séminaire, ce qui permettra aux internautes de les consulter et d’envoyer des questions. Les discussions auront lieu, les jeudis de 17 à 18h:

 

  • 7 février 2019 – Patricia Caillé, Université de Strasbourg (CREM, EA 3476) : « De l’usage des approches critiques dans la conceptualisation du rapport aux films aujourd’hui en Tunisie »

Bio : Patricia Caillé est enseignante-chercheuse à l’Université de Strasbourg (CREM, EA 3476). Ses recherches portent sur les cinémas du Maghreb, en particulier les réalisatrices, la circulation des films et les pratiques spectatorielles. Elle a codirigé avec Florence Martin les Dossiers Africultures nº89-90, “Les Cinémas du Maghreb et leurs publics” (2012), avec Abdel Benchenna et Nolwenn Mingant, le nº101-102 « Circulation des films : Afrique du Nord et au Moyen Orient » (2016). Cofondatrice d’HESCALE, elle a également codirigé avec Claude Forest l’ouvrage Regarder des films en Afriques (Presses du Septentrion, 2017). Elle a aussi publié de nombreux articles.

ABSTRACT : Dans les années soixante-dix, les études sur les médias de masse se sont développées autour d’approches critiques, les cultural studies, et d’approches empiriques, tandis que d’autres chercheurs et théoriciens de la littérature délaissant la relation de l’auteur au texte au profit d’un intérêt pour le lecteur, s’étaient penchés sur la réception, l’expérience esthétique des textes et les effets, sans pour autant toujours s’affranchir du texte. Dans un article à paraître dans Théorème, « Comment choisir un film à voir ? Une enquête pour comprendre les cultures cinématographiques des 15-24 ans », nous sommes partie du texte de Laurence Allard « Dire la réception » (1994), qui fait converser ces divers courants de pensée et nous permet de situer notre questionnement. Ainsi cette communication tentera d’interroger la façon dont la lecture d’approches critiques peut constituer un socle au développement de tels travaux de recherche.

 

  • 28 mars 2019 – Fayçal Sahbi, Université d’Oran 1 : « Analyse de la réception du cinéma en Algérie : Quelles théories pour quels terrains ? »

Bio: Fayçal Sahbi est docteur en sciences de l’information et de la communication. Diplômé du département de cinéma de la Sorbonne nouvelle, il est enseignant-chercheur au département de communication à l’université Oran 1 où il exerce notamment au sein de l’équipe du master audiovisuel.

ABSTRACT: A travers de cette communication, nous tenterons de nous intéresser à la réception du film de cinéma en Algérie et la manière dont interviennent les théories de la réception et les cultural studies pour analyser cette réception. Dans un milieu de dit contraint (pour des raisons politiques, sociales mais aussi académiques), il arrive qu’on puisse ressentir un certain décalage entre « la théorie » et le « terrain ». La question que l’on peut poser est la suivante : Peut-on analyser un objet de recherche à l’aide de théories et d’outils produits dans d’autres contextes culturels, politiques et académiques ?

 

  • Le 23 mai 2019 – Jonathan Haynes, Long Island University – «Perspectives on the Nigerian film industry»

Bio: Jonathan Haynes is interested in how literature, film, and other arts are related to the cultures and societies that produce them. At first English Renaissance literature was the main focus of his studies, but then his interests shifted to Third World film and literature and African studies. For two decades he has been closely following the growth of the Nigerian film industry, Nollywood. He has published Nollywood: The Creation of Nigerian Film Genres (U of Chicago P, 2016), and with Onookome Okome Cinema and Social Change in West Africa (Jos, Nigeria: Nigerian Film Corporation, 1995).

Abstract: The academic study of Nollywood has always been dispersed in geographical, disciplinary, and intellectual dimensions. The recent advent of transnational corporations into the film industry, linked to new distribution technologies, complicates the object of knowledge: no longer simply a grassroots “popular art” based in the informal economy, Nollywood now also has a fully capitalist sector, integrated into the global media environment, even as continuing failures of the Nigerian state impose important blockages. This seminar will explore the consequences of these developments for the paradigms used to understand Nollywood and its products.

 

  • Le 6 juin 2019 : Alessandro Jedlowski, FRS-FNRS, Université Libre de Bruxelles – « La révolution vidéo en Afrique subsaharienne : Nigéria, Ethiopie et Côte d’Ivoire»*

Bio : Alessandro Jedlowski est collaborateur scientifique du Fonds National pour la recherche scientifique Belge (FRS-FNRS) au Centre de Recherche en Information et Communication de l’Université Libre de Bruxelles (Belgique). Au cours des dernières années, sa recherche s’est concentrée sur l’analyse des aspects économiques et politiques de la production cinématographique au Nigeria, en Ethiopie et en Côte d’Ivoire, et sur les interactions entre les industries médiatiques africaines et celles des pays du Sud tels que l’Inde et la Chine. Il a publié de nombreux articles dans des ouvrages collectifs et sur des revues internationales telles que African Affairs, Media, Culture and Society and Television and New Media. Plus récemment, il a dirigé la publication des ouvrages Mobility between Africa, Asia and Latin America: Economic Networks and Cultural Interactions (Zed Books, 2017) et Cine-Ethiopia: The History and Politics of Film in the Horn of Africa (Michigan State University Press, 2018) et d’un numéro spécial de la revue Journal of African Cultural Studies (Vol. 29, no. 1) sur les interactions médiatiques entre Afrique et Chine.

Abstract : Avec l’introduction de technologies analogiques et (plus tard) numériques, de nombreux pays d’Afrique subsaharienne ont connu l’émergence et la croissance rapide d’industries audiovisuelles commerciales produisant des films en format vidéo. L’industrie nigériane, Nollywood, est le cas d’étude qui a suscité le plus l’intérêt, générant la formulation d’un modèle analytique qui a souvent influencé notre compréhension d’autres exemples de production ayant lieu sur le continent. Cette communication propose une analyse comparative de l’histoire de la production vidéo dans trois pays d’Afrique subsaharienne (Nigéria, Ethiopie et Côte d’Ivoire) afin de complexifier notre compréhension de la production vidéo africaine au-delà du modèle de Nollywood. À partir des documents recueillis au cours de recherches de terrain ethnographiques menées dans chacun de ces pays, cette contribution offre une contribution originale au débat actuel sur l’impact des technologies analogiques et numériques sur la transformation du cinéma africain en mettant en évidence le rôle des contextes politique, économique et infrastructurel locaux sur le développement des industries vidéo en Afrique subsaharienne. L’application d’une méthode ethnographique permet de développer ce que l’on pourrait définir comme une approche holistique de l’étude des médias, capable d’étudier conjointement les pratiques et les discours relatifs à la production, la distribution et la consommation des médias, tout en montrant les interactions réciproques entre ces différentes dimensions.

*L’argument de cette communication est élargi et développé dans le chapitre « African videoscapes : Southern Nigeria, Ethiopia and Côte d’Ivoire in comparative perspective » à paraitre en 2018 dans l’ouvrage collectif Companion to African Cinema, sous la direction de Kenneth Harrow et Carmela Garritano (Londres et New York : Blackwell-Wiley). Je remercie Rozenn Nakanabo Diallo pour son aide dans la préparation de la version française du texte présentée ici.