Séminaire du 7 juin 2018 : « Réception des projections coloniales en Algérie : le dilemme du SDC entre les versions française et arabe dialectal »

Le 7 juin 2018 : Vincent Bouchard – Réception des projections coloniales en Algérie

Vidéo de Vincent Bouchard
→ Discussion avec sur la Chaine YouTube

Réception des projections coloniales en Algérie : le dilemme du S.D.C. entre les versions française et arabe dialectal
Comme d’autres puissances coloniales en Afrique, la France a organisé des projections cinématographiques pour renforcer son emprise sur les populations colonisées et apporter un « message éducatif ». Les Britanniques étaient les premiers à généraliser ce type de propagande avec la création du Colonial Film Unit (CFU) lors de la deuxième guerre mondiale, suivis des gouvernements coloniaux au Congo belge et en Algérie française. Si l’inefficacité de ces séances est aujourd’hui largement attestée (Rolot, Ramirez, 1990 ; Burns, 2000 ; Bouchard, 2011), il est tout de même intéressant d’interroger ces dispositifs en détail, afin, par exemple, d’observer comment certains organisateurs ont tenté d’adapter les films à l’audience, soit en donnant un contenu local aux films, soit en traduisant et commentant en directles films dans la langue des spectateurs (l’un n’excluant pas l’autre). Or, si la langue de projection est un facteur important dans cette forme de contrôle des opinions, il est loin d’être le seul et il ne semble pas y avoir de solution idéale : chaque organisateur cherche alors un compromis entre ses contraintes techniques et économiques, le contexte socio-politique et la manière dont il conçoit la propagande cinématographique. Si l’on prend l’exemple de l’administration française en Algérie, le Service de diffusion cinématographique (SDC), en charge de propagande du Gouvernement Général, était confronté à de nombreux problèmes : diversité des publics (Européens plus ou moins francophones ; populations arabophones ; Kabyles ; etc.) ; disponibilité des films en version française ; faiblesse des budgets de doublage ; nécessité d’expliquer le film avant, pendant et après la projection ; etc.

À travers une analyse des comptes rendus produits par le SDC et disponibles dans les archives de l’ANOM, cette présentation vise à explorer comment les films étaient reçus, en particulier en fonction de la version de diffusion. En contextualisant l’importance de la langue de projection, cette communication montrera l’efficacité relative de ce mode de propagande, où la diffusion de contenu et d’idéologies à lieu autant via le discours véhiculé par les films qu’à travers l’aspect spectaculaire du dispositif lui-même.

Bio : Vincent Bouchard est Assistant Professor of Francophone Studies à Indiana University – Bloomington. Après une double formation en études cinématographiques à Sorbonne Nouvelle (Paris 3), et en littérature comparée à l’Université de Montréal, il a enseigné dans le programme d’études francophones de l’Université de Louisiane à Lafayette. Il a publié Pour un cinéma léger et synchrone à Montréal ! aux Presses Universitaires du Septentrion (2012). Il a également coédité un numéro de la revue Cinémas (« Cinéma & oralité », 2010) ainsi que Dialogues du cinéma (Nota Bene, 2016).